Tunisie-Tribune (qualité de l’air intérieur) – La qualité de l’air intérieur est devenue aussi importante que le confort thermique, notamment en raison de la crise sanitaire.
Dans les bureaux d’avant, il y a avait les « Oh la la, il fait trop chaud! » et autres « Mais non, moi j’ai froid!« , qui conduisaient alternativement les salariés à ouvrir les fenêtres, fermer les fenêtres, monter le chauffage, baisser le chauffage, allumer la climatisation, couper la climatisation… Aujourd’hui, les bureaux mettent l’accent non plus sur la température ambiante, mais sur la qualité de l’air intérieur. Le sujet est de taille: les Français passent environ 80% de leur temps à l’intérieur de bâtiments ou dans des espaces clos (logements, bureaux, établissements scolaires, transports en commun, etc.), où de nombreux polluants sont présents dans l’air que l’on respire. Ces polluants sont multiples: chimiques tels les composés organiques volatils, biologiques comme les moisissures, les bactéries ou les virus, ou physiques (particules, fibres, radon…). Selon une étude menée en 2014 par l’Observatoire de la qualité de l’air intérieur (OQAI) et l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) sur les six polluants principaux de l’air intérieur, la pollution de l’air intérieur engendre chaque année en France 20.000 décès prématurés et représente un coût socio-économique de 19 milliards d’euros.
Un enjeu sanitaire
Dans les bureaux, la crise sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19 a accéléré l’intérêt pour la qualité de l’air intérieur. « Le phénomène n’est pas nouveau car la qualité de l’air intérieur est une des quatre composantes du confort global, avec la lumière, l’acoustique et le confort thermique, remarque Clara Getzel, directrice générale de la start-up spécialisée Kandu. Mais sa prise en compte est aujourd’hui beaucoup plus importante, en amont des projets de construction de bureaux » .
De fait, « la qualité de l’air intérieur doit être prise en compte à toutes les étapes, depuis la conception et le choix du mode constructif, lors de la phase d’aménagement et du choix des matériaux, aux usages et à leur entretien au quotidien« , soulignait Suzanne Déoux, docteur en médecine ORL, professeur associé honoraire à l’Université d’Angers et présidente de Bâtiment Santé Plus, lors d’un webinaire organisé par le fabricant de revêtements de sols Tarkett. A chaque fois, il faut faire les bons choix. Par exemple, « il ne faut pas croire que tous les matériaux naturels ou biosourcés sont sans danger », rappelle Suzanne Déoux qui cite le cas malheureusement bien connu de l’amiante. Bien que naturelle, cette roche est hautement cancérogène.
Aérer, premier geste barrière
En termes sanitaires, ouvrir la fenêtre pour renouveler l’air est sans doute un des meilleurs gestes qui soit et c’est un des gestes barrières rappelé par l’OMS (Organisation mondiale pour la santé) dans la lutte contre le coronavirus. En moyenne, la recommandation est d’aérer toutes les trois heures pendant une quinzaine de minutes. En pratique, notamment dans certains bureaux, c’est impossible puisque les fenêtres ne peuvent pas s’ouvrir.
« Paradoxalement, c’est aussi une contrainte liée au confort thermique, dans la mesure où les bâtiments bénéficient d’une isolation renforcée pour respecter les normes thermiques, indique Clara Getzel. La ventilation doit donc être renforcée et particulièrement bien entretenue. Elle doit être aussi pilotée plus finement, en tenant compte par exemple des concentrations de composés organiques volatils ou de CO2, ce qui peut enrichir les services proposés par les acteurs du Facility management. »
Composer avec le confort thermique
En juin dernier, le groupe Covivio, EDF et Impulse Partners ont organisé un appel à projets européen, auprès de start-up, de PME et de grandes entreprises. Baptisé « Air Quality Challenge« , il vise à améliorer la qualité de l’air intérieur tout en réduisant les consommations énergétiques des bâtiments. Près de 70 candidatures en provenance d’une dizaine de pays ont été analysées par Covivio et EDF, qui viennent de dévoiler les solutions lauréates: Octopus Lab et Enerbrain. Créée en 2017, la société française Octopus Lab a développé INDALO Supervision, une solution logicielle qui prévoit et optimise les pics de pollution de l’air intérieur en pilotant la ventilation tout en améliorant les performances énergétiques du bâtiment.
Fondée en 2014, l’entreprise italienne Enerbrain a créé une solution de pilotage utilisant l’intelligence artificielle afin de réduire l’empreinte carbone d’un bâtiment, en diminuant la consommation d’énergie et en offrant une meilleure qualité de l’air et un meilleur confort aux utilisateurs dans les bâtiments. « Nous allons tester ces solutions, dès l’an prochain, sur nos sites, durant six à neuf mois, en France et en Italie, avec différents types de locataires et selon différents modes d’occupation, en fonction du retour -à venir- des salariés dans les bureaux après le confinement ou de la poursuite du télétravail« , explique Philippe Boyer, directeur des relations institutionnelles et de l’innovation de Covivio*.