Tunisie-Tribune (Scrutin Européen) – Poussée relative de l’extrême droite, affaiblissement d’Emmanuel Macron, avenir incertain de la présidente de la Commission Ursula von der Leyen, recul des écologistes, participation en hausse… Cinq leçons à retenir des élections européennes.
– Une hausse de l’extrême droite à relativiser
L’extrême droite progresse incontestablement avec le Rassemblement national en tête en France, comme le FPÖ en Autriche, tandis que l’AFD termine en seconde position en Allemagne, devant les sociaux-démocrates du chancelier Olaf Scholz.
Mais à l’échelle de l’UE, elle reste divisée entre le groupe ID autour du mouvement de Marine Le Pen, dont l’AFD a été récemment exclue après des scandales liés à sa tête de liste, et le groupe ECR autour des Polonais du Pis qui subissent un revers et Fratelli d’Italia de Giorgia Meloni, en nette progression.
« On ne peut pas dire que ce soit une poussée très significative. C’est un mouvement continu depuis plusieurs élections, mais il ne permet pas de constituer une minorité de blocage », souligne Christine Verger, vice-présidente de l’Institut Jacques Delors.
La plupart des experts jugent inenvisageable un regroupement des différents partis nationalistes qui leur permettrait de peser davantage. Les Polonais du « Pis antirusses n’accepteront jamais d’accueillir les députés du Rassemblement national » assure Mme Verger qui juge « fort probable qu’un cordon sanitaire continuera de s’appliquer à l’AFD ».
– Macron affaibli ? –
Oui et non -Le président Emmanuel Macron a été sanctionné par les électeurs français et a décidé dans la foulée de dissoudre l’Assemblée nationale. Sa candidate Renaissance Valérie Hayer a réuni environ 15% des voix, loin derrière les quelque 32% du Rassemblement national.
Son autorité en souffrira, avec une délégation d’eurodéputés réduite et donc moins influente au sein du Parlement européen.
Mais, au sein du Conseil européen, la puissante institution qui représente les 27 Etats membres, M. Macron reste un acteur majeur quel que soit le résultat des élections.
« La France reste un grand pays avec un président qui a beaucoup de pouvoir », souligne Christine Verger. C’est d’ailleurs la même chose pour le chancelier allemand, dont les sociaux-démocrates ont subi un revers similaire en ne recueillant que 14% des suffrages. Le poids de l’Allemagne n’en sera pas réduit pour autant.
– Avenir incertain pour Ursula von der Leyen –
-Présidente sortante de la Commission européenne, à l’initiative des textes législatifs dans l’UE, l’Allemande Ursula von der Leyen, était la tête de liste des conservateurs du PPE, qui ont renforcé leur position de premier groupe au sein du Parlement européen.
La coalition des sociaux-démocrates, des libéraux et des conservateurs qui l’a adoubée en 2019, dispose de nouveau d’une majorité avec plus de 400 sièges sur les 720 du Parlement européen. « La coalition centriste reste le résultat le plus probable de l’élection, donc l’UE devrait continuer de fonctionner comme par le passé », note Heather Grabbe de l’institut Bruegel.
Ursula von der Leyen « dispose d’une majorité sur le papier » mais elle est tout de même « sur le fil du rasoir », juge Mme Verger. « Les experts estiment à environ 10% les pertes de voix » qu’elle pourrait subir en raison de dissidents, dans ce cas son élection par les eurodéputés ne serait pas assurée.
– Le blues des Verts-
« Les Verts sont clairement les perdants de l’élection, avec Macron », souligne Francesco Nicoli pour Bruegel. Ils perdent une vingtaine de sièges et devraient compter quelque 53 élus au Parlement.
Lors de l’élection de 2019, le climat était une problématique clé pour les électeurs. Aujourd’hui, les inquiétudes portent sur la sécurité dans le contexte de guerre en Ukraine et de forte inflation « et les Verts n’ont pas su répondre à cette demande », estime M. Nicoli. Leurs idées pour l’environnement, qui engendrent des coûts supplémentaires pour les consommateurs, ont au contraire mobilisé l’électorat contre eux.
Le Pacte Vert a été un projet phare de la Commission ces cinq dernières années. « Un des enjeux des prochains mois, est de voir si on aura une pose dans sa mise en œuvre », explique Christine Verger.
– Participation en hausse –
Environ 51% des quelque 360 millions d’électeurs appelés aux urnes ont voté lors de ces élections européennes. C’est une légère progression par rapport à 2019 qui marquait un très net redressement et le taux le plus élevé depuis 1994.
« C’est plutôt une bonne nouvelle pour la démocratie et la légitimité du Parlement européen, estime Mme Verger. A une époque on disait qu’il n’était pas légitime parce qu’il était élu par seulement 40% des électeurs ».