Tunisie Tribune (Salon de l’auto de Genève) – C’est un séisme dans la tectonique des plaques automobiles mondiales, de ceux qui bouleversent un univers et montrent les zones d’effondrement avec une cruauté sans pareil. Abandonné par les exposants occidentaux qui pourtant, hier encore, louaient ses qualités de zone neutre, sans domination d’un constructeur national, le Salon de Genève déserte le Palexpo où il devait se tenir du 14 au 19 février 2023.
Faute d’avoir réuni une affiche digne de son nom, et après trois annulations ces dernières années pour cause officielle de Covid, cet annuel quitte piteusement la Confédération pour aller se tenir à l’automne à Doha, au Qatar. À 5 950 kilomètres par la route de la ville suisse, la capitale du Qatar n’est pas vraiment la porte à côté, mais les pétrodollars font des miracles et aplanissent les difficultés. L’Émirat, déjà organisateur de la Coupe du monde de Football en cette fin d’année, pourra donc pousser le ballon plus loin en faisant rugir les chevaux en novembre 2023.
Les explications quelque peu embarrassées des organisateurs ne trompent personne. « En raison des incertitudes qui pèsent sur l’économie et la géopolitique mondiales, de même que les risques liés à l’évolution de la pandémie, les organisateurs ont décidé de se concentrer exclusivement en 2023 sur la planification de l’événement à Doha », explique Maurice Turrettini, président de la Fondation du Salon international de l’automobile de Genève, dans un communiqué publié hier.
Affiche peau de chagrin
La raison principale est que beaucoup de grands acteurs de l’automobile n’ont pas signé pour louer des stands au Palexpo, officiellement parce que les nouveautés à y présenter, selon le calendrier précédemment établi, ne sont pas prêtes. Le bouleversement géopolitique et les difficultés d’approvisionnement en sous-traitance ont enrayé en effet le rythme des révélations, problème que vit aussi le Mondial de Paris qui doit se tenir en octobre (du 17 au 23) et qui comble les trous de son affiche avec des marques quasi inconnues en Europe.
« En ces temps incertains, de nombreuses marques ne sont pas en mesure de s’engager à participer à un salon en Europe en hiver », explique Sandro Mesquita, le directeur général du Geneva International Motor Show (Gims). C’est même toute la survie économique de l’organisation qui est en jeu, l’argument avancé étant de sauter une édition pour mieux revenir en 2024. Un argument déjà avancé dans les mêmes termes l’an dernier pour parier sur l’édition 2023 espérée en pleine renaissance.
À Doha, ce salon de Genève inédit se rapproche des acheteurs de supercars qui pourront, tout à loisir, essayer à domicile les voitures qu’ils convoitent. Un exercice plus facile que sur les rives du lac, sans déranger les écologistes sourcilleux. Espérons que les six mois supplémentaires pour Doha permettent de nourrir une affiche plus dense qu’à Genève.